COMME UN PAIN
MADE IN FRANCE
Soudain, un craquement
et, aussitôt, c’est la débandade: les pierres dévalent comme des folles
sur les lapiaz allongés le long des pentes herbeuses. Ca saute, ça
vole, ça fait des ricochets, ça crie. Poussières de calcaire, encore
quelques hoquets, puis le grand silence et la lumière bleue du ciel. Je
scrute le versant que je viens de gravir: ni bouquetins, ni chamois.
Tout en bas, l’ombre immobile de trois pins. Un pan de calcaire s’est
décroché tout seul. D’ailleurs, j’avais repéré en montant, une large
cassure sous la crête. La roche montrait son ventre dénudé. Et maintenant, je garde les yeux écarquillés,
guettant encore une présence animale. Cherchant une raison. Rien. Sueur
froide dans le dos. Ne pas traîner à la descente. Ceci dit, j’avais
choisi la pelouse alpine pour grimper. Un rideau de verdure. Comme
souvent dans cas cas-là, la pente a fait semblant de se balader dans le
versant avec un air de langueur ostentatoire. Soudain, une ruade. C’est
à peine si elle se calme désormais. La voici qui se cabre et se raidit.
Je m’accroche à son dos, j’agrippe l’encolure. Je la sens nerveuse sous
mes pieds. Il faut dire que je lui plante mes bâtons dans la chair.
Enfin, l’autre côté du ciel. La bête s’est couchée et retrouve son
calme.
On dit souvent que les pentes raides exigent un temps sec. C’est bien
vrai. D’autant plus quand elles présentent des encoches rassurantes
pour les pieds. Mais quand l’herbe est rase ou qu’elle est haute mais
sèche et couchée sur la pente, c’est guère mieux: la semelle n’agrippe
pas le sol dur. Les conditions idéales sont les suivantes: une surface
sèche et une sous-couche humide. De façon à ce que le pied traverse la
croûte et colle à la pâte. En somme, comme une baguette bien de chez
nous: croustillante à l’extérieur, moelleuse à l’intérieur! Donc,
attendre, en plein été, une bonne journée de soleil après un passage
pluvieux.
Bon, c’est pas le tout. Coup d’œil sur les chicots de calcaire qui
rigolent de mes discours et je dévale la pente. On recausera plus tard.
Alain Lutz
Photos
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