EMOTION ET REFLEXION





Même si un sommet en côtoie un autre, il offrira toujours au randonneur ou à l’alpiniste une approche différente, un décor particulier, des points de vue originaux. C’est déjà le cas quand on gravit un même sommet par des voies ou des versants différents. Ca l’est encore selon les conditions météo qui nous accompagnent. Toute ascension est unique. Ainsi, les Rochers de Pers dont la modeste échine se dresse dans l’ombre du Signal de l’Iseran, cachent une combe sauvage, monde perdu, minéral, sans trace ni cairns. Une profonde solitude imprègne les lieux. Et chaque pas inscrit dans la poussière des éboulis une page d’a
Pointe sud ouest du Châtelardventure. Ici, les piliers rocheux du Signal crèvent le ciel bleu dans la lumière dorée de l’aube; là, un jeune bouquetin s’est levé d’un seul coup et me fixe des yeux, immobile. Je m’arrête et admire la fierté naturelle de sa silhouette. Instant de grâce. Le bonheur est incompréhensible. Aussi insaisissable que le papillon qui nous échappe en laissant sur nos doigts la poudre de ses ailes.

Et puisque nous parlions d’approche, il convient d’ajouter qu’il ne faut pas négliger non plus ces randonnées qui présentent une faible dénivelée, surtout, comme c’est le cas ici, lorsqu’elles sont accessibles par un col routier d’altitude. Car la plupart du temps, cela veut dire que si la marche d’approche est inexistante, on entre tout de suite dans le vif du sujet: on perd l’entrée mais on garde le plat de résistance, celui-là même qui justifie la sortie, pimenté, festif.

De façon plus pragmatique, et pour compléter une réflexion déjà abordée sur la toponymie, la plupart des sommets figurant sur les cartes IGN ont un nom et une altitude. D’autres, très nombreux et souvent secondaires, ont une cote mais pas de nom. Ou en ont eu un, malheureusement tombé dans l’oubli. Aussi, je passe une partie de mon temps à les faire exister dans l’esprit des randonneurs qui veulent bien me lire en leur attribuant un nom. Car pour ces sommets, ils n’ont pas besoin de nous pour dresser leurs rochers aux quatre coins des massifs. D’autres encore, moins nombreux, n’ont ni nom ni cote. Et ne sont pas pour autant dénués d’intérêt. Enfin, il y a ceux, plus rares, à qui on a attribué un nom mais pas de cote. Et c’est le cas pour les Rochers de Pers. Seul, Pierre Maes dans son ouvrage « 50 sommets en toute liberté en Vanoise » a réparé cet oubli en leur donnant l’altitude que j’ai reprise ici. Merci à lui. Pour éviter toute confusion, j’ajouterai encore, en paraphrasant la carte IGN, que le col Pers qu’ils dominent est à 3009m. Enfin que le nom « Pers » se décline de multiples façons puisqu’il possède, dans un périmètre réduit, son glacier, sa Pointe (3327m) et son Aiguille (3386m). 


Alain Lutz





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